Les jeunes du Yukon à l’avant-garde des solutions de santé autochtones

Piper Fordham

Pour de nombreux Autochtones qui grandissent dans de petites communautés, les disparités en santé ne sont pas qu’une question de chiffres : il s’agit d’une affaire personnelle.

Membre de la Première Nation de Teslin Tlingit, au Yukon, Piper Fordham en a elle-même été témoin. Elle a vu amis, proches et Aînés composer avec un système de santé qui paraissait souvent froid, indifférent et déconnecté de leur mode de vie axé sur la nature.

Mme Fordham est aujourd’hui assistante de recherche au sein de l’Unité de soutien de la Stratégie de recherche axée sur le patient du Yukon (YSPOR), où elle a commencé sa carrière comme chercheuse débutante. Dans ce rôle, elle a appris auprès de la communauté qu’en contexte de soins, des gestes simples comme le fait de proposer un repas traditionnel ou une tasse de thé chaud pouvaient procurer un sentiment de confort, de dignité et de familiarité aux patients durant leur épreuve. Ce constat a inspiré son projet de recherche (en anglais seulement), qui visait à aider l’Hôpital communautaire de Dawson, au Yukon, à fournir aux membres des communautés autochtones et des Premières Nations des services et des espaces plus accueillants d’un point de vue culturel.

Un groupe local d’Aînés et de gardiens du savoir nommé Gu Nähtsey (« les plantes que nous ramassons ou récoltons », en langue Hän) œuvrait déjà pour la santé communautaire grâce aux plantes médicinales et aux méthodes de guérison autochtones, et explorait des façons d’intégrer ces pratiques en milieu hospitalier. En parallèle, l’Hôpital communautaire de Dawson avait exprimé le désir de collaborer avec la communauté Tr’ondëk Hwëch’in locale pour rendre l’hôpital plus inclusif.

Ainsi, en travaillant avec Gu Nähtsey, Mme Fordham s’est formée à l’utilisation des plantes médicinales et aux pratiques de guérison et de vie axées sur la nature. Les membres du groupe lui ont aussi donné des conseils sur la façon d’interagir avec la communauté. Elle a en outre engagé des discussions avec l’Hôpital communautaire de Dawson et la Régie des hôpitaux du Yukon pour connaître le point de vue des fournisseurs de soins. Ce travail a abouti à la publication de l’étude Supporting Access to Care (en anglais seulement) [ PDF (2,9 Mo) - lien externe ].

L’YSPOR a encadré Mme Fordham dans son travail de recherche classique — notamment des revues de la littérature et des analyses de données — tandis que les membres de Gu Nähtsey l’ont aidée à intégrer à ces méthodes des éléments des cultures autochtones comme les récits et l’établissement de relations.

Comme l’explique la Dre Michelle Leach, directrice scientifique de l’YSPOR, les recherches de Mme Fordham ont largement dépassé la collecte de données standard. « Elle ne disait pas simplement, “Voici un lien vers un sondage, veuillez y répondre”. Elle aidait les gens à le faire, prenait le thé avec eux et dînait avec les Aînés, raconte la Dre Leach. Pour elle, l’étude signifiait discuter, écouter, partager des repas et du thé, et tisser des liens. »

Piper Fordham et des membres de Gu Nähtsey cueillent des bourgeons d’épinette, connus pour leurs vertus médicinales

Le résultat? Un rapport de recherche adressant à l’Hôpital communautaire de Dawson des recommandations pour améliorer l’expérience des patients autochtones, notamment par des mesures pratiques comme la création d’un espace dédié aux cérémonies culturelles, un accès à l’extérieur permettant de retrouver le lien avec la nature, l’offre de thé et de repas traditionnels, et, dans la mesure du possible, l’intégration de plantes médicinales.

L’YSPOR, l’Hôpital communautaire de Dawson et le Programme de santé des Premières Nations du Yukon collaborent à présent pour mettre en œuvre ces recommandations. De plus, une nouvelle étude vise à approfondir ces recherches pour appuyer la prestation de soins fondés sur la culture dans d’autres milieux de soins au Yukon.

Le travail de Mme Fordham n’est qu’un exemple parmi d’autres de recherche axée sur les communautés menée dans le cadre du Programme pour les chercheurs débutants de l’YSPOR. Depuis 2023, six chercheurs débutants, pour la plupart autochtones, ont dirigé des projets de recherche visant à améliorer la santé et le bien-être dans leurs communautés. Ces personnes adoptent la même « approche fondée sur les forces » qui caractérise le travail de l’YSPOR, mettant l’accent sur les retombées positives plutôt que sur les lacunes ou les problèmes à résoudre.

L’YSPOR a vu le jour en 2021 grâce à du financement territorial et fédéral dans le cadre de la Stratégie de recherche axée sur le patient (SRAP) des IRSC visant à mettre sur pied des unités de soutien. Ces dernières ont pour mission d’intégrer les points de vue des patients, des proches aidants et de la communauté à la recherche, de même que des données probantes axées sur les patients aux soins de santé.

Ayant constaté par ses échanges avec la communauté que les jeunes du Yukon cherchaient des façons d’aider leur entourage, l’YSPOR a créé le Programme pour les chercheurs débutants. Il s’adresse aux élèves et aux diplômés du secondaire ainsi qu’aux étudiants de niveau postsecondaire, pour la plupart novices en recherche, mais désireux d’apprendre et de changer les choses.

En bref

L'enjeu

Par le passé, la recherche sur la santé des peuples autochtones a négligé leurs systèmes de connaissances, adoptant une perspective axée sur les faiblesses, qui consistait à étudier un problème plutôt qu’à rechercher des retombées positives.

La recherche

Avec l’aide de l’Unité de soutien de la SRAP du Yukon, des chercheurs débutants élaborent au sein de leur communauté des solutions répondant aux besoins de soins de santé des Autochtones de la région. Dans son étude Supporting Access to Care, Piper Fordham a présenté à l’Hôpital communautaire de Dawson des façons pratiques de mettre en place ou de développer des espaces et des services accueillants d’un point de vue culturel.

En savoir plus : YSPOR Junior Researchers (en anglais seulement)

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